A celle qui est partie

Publié le par Docteur Chocolatine

A celle qui est partie

Il y a un an, jour pour jour, j'assistais à l'enterrement de celle qui fut ma dernière grand-mère, de celle qui m'a tant apporté que des dictionnaires entiers et des nuits sans sommeil ne suffiraient à pas le décrire. De toute ma vie, je crois que ce fut l'un des jours le plus douloureux de toute mon existence.

Des mois pour s'en remettre, la crise sanitaire pour s'oublier, oublier le chagrin et se remémorer sans cesse sa présence chaque jour. Le vide qu'elle a laissé me pèse et sa joie de vivre m'allège.

Il existe des êtres qu' on chérit d'avoir tant aimé.
 
 

Ce texte que je vous confie aujourd'hui est celui que j'ai lu dans ce moment d'adieu. Parce que je souhaite vous dire qu'on aime tous les âges, que tous les âges comportent leurs moments de joie, de tendresse et d'humilité et que nos personnes âgées méritent encore beaucoup d'amour et d'attentions jusqu'à leur dernier moment.

J'y ai joint quelques photos qui témoigneront, je l'espère, à la fois de ses derniers moments douloureux surtout pour elle (mais pour nous aussi car la voir partir est une grande souffrance) et de ses moments paisibles où elle profitait de chaque instant.

Si vous avez la chance d'avoir encore vos grands-parents ou vos parents, chérissez les. Ne regrettez aucun moment passé avec eux, ils seront précieux quand ils seront partis.

 
Il y a quelque chose de plus fort que la mort, c'est la présence des absents dans le coeur des vivants.
(Jean d'Ormesson)

 

"Manou
 
Tes derniers moments et tes derniers mois ont été empreints d'une grande humilité et d'une grande tendresse.
 
Moi, qui ait tant bercé mes petits dans mes bras, je garde de ton corps fatigué, ce corps si maigre et qui m'avait tant câliné, tant de caresses données à ta joue ridée, des baisers dans ton cou et sur ton front, ton grand sourire quand tu me voyais avec tes yeux bleus passés et ta voix me disant tout simplement "Tu es belle, je t'aime, merci" .
 
Alors comme tu t'es occupée de moi bébé, je t'ai donnée à manger, je t'ai lavée les pieds, je me suis occupée de ton visage, je t'ai tartinée de crème hydratante et parfumée. Et par ces gestes, je continuais cet amour qui nous lie.
 
J'ai vécu cette année dans l'inquiétude qui m'étreignait sans cesse. Je savais que tu partirais. Ma toute petite me le disait souvent à sa manière "Manou, elle est pas encore morte mais elle va bientôt mourir".
Dois je garder ces douloureux et forts souvenirs en mémoire? Oui, car ils sont le résultat de tant d'autres années.
 
Tes petits cafés avec Papinou, les pains au chocolat à la sortie de l'école, ton thé fumé si amer, tes parties de 1000 bornes et de Monopoly, tes cakes un peu brûlés (grâce au four à gaz), tes crêpes au beurre demi-sel/sucre, ton foie gras poêlé à la mangue, ton welsh et ta tarte tatin, tes premières verrines (inspirée par Philippe Conticini?), tes saint jacques au whisky et cette fameuse escalope viennoise à la crème où j'ai pris toutes mes rondeurs d'adolescence, tes magazines féminins que je feuilletais, ta façon de te maquiller, ton élégance et tes bisous à cause desquels je devais essuyer le rouge à lèvre sur ma joue...
 
Mais tu avais aussi un sacré caractère auquel je me suis confrontée ado: toi, la première femme de la famille à passer ton permis (sans l'accord de ton père), toi qui a décidée d'être infirmière, toi qui menait mon très gentil grand-père à la baguette, toi qui t'es occupée de ton papa jusqu'à ses 100 ans et de ta première arrière petite fille à 78 ans alors que je courais dans mon rythme de l'internat ...
 
Tu aimais les macarons, les bons restaus, les beaux vêtements, les chaussures bien cirées et une maison bien rangée.
Tu aimais papoter, tu aimais venir voir ta petite fille à Lyon ou de passage sur Paris... Qu'est-ce que tu étais fière de me voir en uniforme!
 
Tu adorais tes arrières petites filles et tu aimais ta famille, petite mais si précieuse pour toi.
 
Je voudrais retourner dans cette dimension où tu étais en bonne santé et moi encore insouciante.
 
Mais nous devenons ce que vous êtes et un jour, je le souhaite, je serai comme toi, entourée de la tendresse de celles à qui je dois la joie d'être maman.
 
Chacun rend hommage à sa manière, je sais que sans toi, je n'aurais pas cette joie de vivre et cet amour à donner."
A celle qui est partie
Et la Vie continue! A la Joie et à l'Amour!

Et la Vie continue! A la Joie et à l'Amour!

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V
Un bel hommage, à la hauteur de l'amour que vous lui portiez. Nos morts ne nous quittent jamais, ils continue à vivre en nous.
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L
Une telle présence '' un tel amour ne s oublie pas notre mamie de 91 ans n'est pas au top. ...
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C
Un bel hommage qui m'émeut beaucoup en ce moment où ma maman va très mal !
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O
la douleur et l'amour sont présentes tout au long de ce joli texte empreint de douceur et écrit avec pudeur. J'ai été très touchée. Quel bonheur pour vous d'avoir été ainsi aimée, gardez précieusement son souvenir qui la fait vivre, mais je n'ai pas besoin de vous le dire. Pensées.
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O
présents pas présentes, bien sûr....
M
Bonjour c'est un très bel hommage, ainsi que la phrase de Jean d'Ormesson. Merci.
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F
Juste Magnifique...et Beau
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M
un bien bel hommage émouvant à ta Manou .Bises.
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A
Merci pour ce très bel hommage à votre grand-mère. Moi, pendant onze ans, je me suis occupée de ma mère atteinte d'Alzheimer. Je l'ai bichonnée pendant sa maladie comme elle m'avait chouchoutée tout au long de ma vie. Elle est partie il y a sept ans, je pense à elle chaque jour, je me "nourris" de tout ce qu'elle m'a enseigné, en un mot : elle est présente à mes côtés et me fait avancer dans la vie.
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A
Merci pour ce très bel hommage à votre grand-mère. Moi, pendant onze ans, je me suis occupée de ma mère atteinte d'Alzheimer. Je l'ai bichonnée pendant sa maladie comme elle m'avait chouchoutée tout au long de ma vie. Elle est partie il y a sept ans, je pense à elle chaque jour, je me "nourris" de tout ce qu'elle m'a enseigné, en un mot : elle est présente à mes côtés et me fait avancer dans la vie.
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A
Merci pour ce très bel hommage à votre grand-mère. Moi, pendant onze ans, je me suis occupée de ma mère atteinte d'Alzheimer. Je l'ai bichonnée pendant sa maladie comme elle m'avait chouchoutée tout au long de ma vie. Elle est partie il y a sept ans, je pense à elle chaque jour, je me "nourris" de tout ce qu'elle m'a enseigné, en un mot : elle est présente à mes côtés et me fait avancer dans la vie.
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G
quel témoignage émouvant!!!
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L
Merci du fond du coeur pour cet article.
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C
Merci merci Grand merci pour ce témoignage ,comme vous j'ai une grand'mère chérie qui est partie porter sa joie ailleurs ,il y a cinquante ans de cela ,j'ai septante trois ans(hé,oui belge) ,,elle ne m'a jamais quittée ,elle est mon soleil ,mon modèle comme sa fille qui est ma maman .<br /> Deux cuisinières "intuitives ",je refait leurs recettes ,j'y ajoute avec plaisir les vôtres .<br /> Quand on a eu la joie d'être aimée par ces si bonnes grand'mères ,on peut affronter beaucoup de choses et continuer ce qu'elles ont semé .
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